Cannelle avait à peine posé un pied sur l'herbe qu'une voix sembla l'interpellé un peu plus loin. Surprise, elle sursauta en se tournant vers une demoiselle assise, un carnet des crayons à la mains. Elle ne l'avait pas remarquée en venant jusque là, mais de toute évidence, elle venait de la dérangée en plein élan artistique. Cependant, ce parc et ce parterre appartenait à tout le monde de visu, la jeune fourbe ne voyait donc pas de raison de quitter le parterre de fleur, simplement, elle ne devait pas entrer dans sa ligne de vue. Rien qu'à la façon dont elle semblait croire que tout lui appartenait, elle était persuadée de se retrouver face à l'une de ses avides éhontée aux manières de petites princesses. Croisant les bras sur sa poitrine, la jeune femme poussa un soupire avant de la jaugée du regard. Elle savait que ces crétins d'avide et de belliqueux avaient des avantages certains qui lui échappait, elle ne se laisserait pas pour autant marcher sur les pieds par la première venue.

- Ce parc n'est pas votre propriété que je sache. Si vous l'aviez demandé avec plus de politesse, j'aurai peut-être consenti à m'écarter.

Visiblement, elle était en plein travail artistique. Et même si la plastique de Cannelle était plus que généreuse, la jeune demoiselle ne devait pas avoir envie de faire autre chose qu'un paysage. Mais en attendant, ce parterre avait calmement accueilli la jeune femme qui aurait pu tout simplement passer son chemin quand elle aurait eu fini de s'extasier sur les fleurs. Même si sa voix semblait légèrement acerbe, elle avait été courtoise et polie. Elle se demandait comment réagirait la jeune femme fasse à un refus d'obtempérer.

Cannelle posa ses yeux vert sur le carnet et les crayon que la jeune femme avait mis en évidences. Elle haussait alors les épaules. En quoi le fait que la jeune femme soit présente gâcherait donc cette simple ébauche. Et le fait d'être une artiste semblait lui faire croire qu'elle était toute permise. Pas question, du coup, pour la jeune française de se remettre en question. Et ce, malgré la remarque de son interlocutrice. Certes, quelques brins d'herbes avait été maltraité durant cette opération, pourtant, aucune fleur n'était de près ou de loin menacée. Quoique, peut-être serait-ce drôle de voir la réaction de la jeune femme si jamais elle cueillait l'une de ses précieuses fleurs.

Soupirant, elle observa la jeune femme aux crayons, d'instinct, elle savait que c'était une avide. Cet air hautain qui croit que tout leur ait du en était la preuve. Cependant, elle n'en avait jamais entendu parler auparavant, impossible dès lors de mettre un visage sur le nom de cette importuneuse. Mais qu'à cela ne tienne, il n'était écrit nulle part que la fille Delaunoy se laisserait marcher sur les pieds. Voyant que son interlocutrice se permettait donc de la tutoyer, elle en fit autant.

- Oh mais ma pauvre chérie, c'est toi qui contribue à gâcher ce paysage. Des tas de gens passent et repassent par ici - et tu devais très certainement le savoir avant de t'installer là - si tu ne m'avais pas interpellée, mes pas m'auraient sans doute déjà amené bien loin. Alors cesse donc te faire ton intéressante et repart à l'assaut de ton dessin, regarde, tu as oublié une fleur, là.

Tant de désinvolture. Après tout, il n'y avait que des paroles censée dans son discours. Voilà qu'elle se sentait agressée pauvre artiste incomprise. Était-ce une manière d'attirer l'attention ? Dommage, elle avait un si charmant visage et cette moue de mécontentement risquait fortement de lui faire apparaître quelques rides prématurées.

- Cessez donc de faire cette tête, cela ne vous apportera rien d'autres que des rides. A votre âge, ce serait triste.